Les experts et les spécialistes estiment que l’écosystème de l’innovation a beaucoup évolué au cours des cinq dernières années. Mais pour passer la vitesse supérieure, il est indispensable de lever plusieurs obstacles sur lesquels butent, aujourd’hui, les jeunes pousses. Il s’agit notamment de la loi de change, du paiement mobile mais aussi du financement.
«Sur les 11,1 millions d’euros investis par le fonds de fonds Anava, seuls 5 millions d’euros ont bénéficié aux start-up tunisiennes. Et pour cause : un ralentissement dû à la contraignante loi de change», a fait savoir Nejia Gharbi, directrice générale de la Caisse des Dépôts et Consignations, lors du webinaire «avons-nous les moyens d’investir dans l’économie du savoir ?», qui a été organisé, récemment, par l’Iace.
Le débat en ligne, qui a réuni des représentants du département des Technologies de la communication et de l’Economie numérique mais aussi de l’écosystème des start-up, a été l’occasion de dresser un état des lieux de l’innovation en Tunisie.
Rappelant que le code de change constitue un des principaux freins qui ralentissent la dynamique de l’écosystème de l’innovation, la responsable a fait savoir que la nouvelle loi de change, qui verra bientôt le jour, permettra de lever cet obstacle sur lequel butent les fonds d’investissement libellés en devises.
Elle a, en outre, ajouté que l’écosystème des start-up en Tunisie a beaucoup évolué grâce à la dynamique qui a vu le jour après l’adoption de la loi «Start up-Act» et qui a été accélérée avec la mise en place de divers mécanismes et programmes de financement qui ont bénéficié aussi bien aux start-up qu’aux structures d’accompagnement (Startup Support Organization SSO). Ainsi des programmes comme «Flywheel», «Enlien», «Fast» (Femmes et Accélération pour les start-up et TPE) ont joué le rôle de booster pour l’écosystème et ont permis de financer, entre autres, l’accompagnement des start-up. Gharbi reconnaît cependant que le financement en capital n’a pas atteint, à ce jour, le niveau de maturité attendu.
822 start-up labellisées
De son côté, Tarek Chelaifa, manager chez Gsma, a, en somme, souligné que l’écosystème des start-up a beaucoup évolué au cours des 5 dernières années.
Le site Tunisie a gagné en visibilité et a pu drainer des investisseurs étrangers. «Il y a cinq ans de cela, il était impensable qu’un startuppeur envisage de lancer une start-up de la création. Aujourd’hui, la Tunisie compte plus de 700 start-up. Il y a des structures d’accompagnement, un marché labellisé mais aussi des investisseurs et du financement. La question aujourd’hui c’est à quelle hauteur faut-il financer pour avoir des start-up comme «InstaDeep». De surcroît, il n’y a pas de fonds pour chaque stade de croissance de la start-up», a-t-il précisé.
Il a ajouté qu’en atteignant une certaine maturité, les start-up tunisiennes se trouvent confrontées à des problèmes en termes de marché mais aussi de compétences et de financement. Un plafond de verre qu’elles ne peuvent briser qu’en s’exportant à l’étranger. Le paiement mobile (la plupart des achats en ligne sont payés cash à la livraison) mais aussi les inégalités numériques sont également des obstacles qui persistent aujourd’hui et qui ralentissent la croissance et l’évolution des start-up en Tunisie.
Yasser Bououd, membre de l’association Startup Tunisia, a, pour sa part, mis l’accent sur le facteur temps. Pour lui, il est indispensable d’accélérer l’investissement des financements prévus par le fonds des fonds «Anava» —qui marque le pas— pour préserver et pérenniser les start-up les plus matures, en particulier, dans ce contexte économique morose. De son côté, Wissem Mekki, directeur de l’économie numérique au ministère des Technologies de la Communication et de l’économie numérique, a fait savoir que depuis avril 2019 (adoption de la loi Startup Act), 822 start-up ont été labellisées. Il a ajouté que la loi «Start-Up Act 2», qui est en cours d’élaboration, permettra de pallier les lacunes de la première version de la loi.